Mon patronage


    Au début de l’été, pendant la période des vacances,mes parents quittèrent la rue du château pour s’installer au patronage. Du haut d’à peine deux trois printemps,je découvris façon Pagnol ce lieu pharaonique qui allait être pour le restant de mes jours l’écrin précieux de mon enfance.

 

    L’appartement était gigantesque,tout en plancher et bien qu’il n’était pas de première jeunesse, il m’allait à ravir ! Perchée sur mon piédestal, au sommet de ma tour d’ivoire de deux étages, je  trottais allègrement d’une fenêtre à l’autre, regardant tour à tour avec admiration,  côté pile la vue imprenable que nous avions sur Sainte Barbe, côté face la cour à demi couverte d’un grand préau dans lequel s’encastrait par je ne sais qu’elle magie,un magnifique tilleul en fleurs.

 

    Ce ne fût pas ma seule surprise! Le patronage, ancienne école privée réhabilitée en appartements, était aussi un mini  « Disney Word » avant- gardiste avec ciné incorporé  et de multiples animations. Chaque jeudi et les jours de vacances, usant leurs fonds de culotte avec vivacité, se retrouvaient pour une véritable « guerre des boutons » tous les mouflets du coin et du du canton.

 

    Dès le premier soir, je m’endormis avec ravissement ballottée par le son d’une fanfare! Les murs et  le plancher se mirent au diapason m’emportant  en quelques  vibrations dans les bras de Morphée, ce qui dès le berceau me donna la fibre musicale. L’ambiance s’annonçait festive et prometteuse!

 

    Le  comble du bonheur, fût sans doute de découvrir que je partageais aussi  cette grande maison avec d’autres colocataires en couches culottes! Je fis tout d'abord la connaissance d'henry, mon voisin du dessous et yéyé celle de sa sœur Claudine.

 

    Après les préliminaires usuels de lèche bébé, Henry et moi devinrent vite indissociable, s’unissant dès le premier clin d’œil pour le meilleur et pour le pire. Les filles s’adonnèrent sans plus attendre  à leurs jeux de poupée tandis que nous, jetâmes notre dévolu sur un vieux corbillard somnolant dans un coin du préau.

 

    Dans ce curieux carrosse, tout de noir vêtu et orné de dorures, nous installèrent notre quartier général, intrigués de le voir de temps à autre disparaître à l’arrière train d’un énorme cheval. Des heures durant, nous restions là à jouer et à voyager au gré du temps et de nos fantaisies, sans jamais nous lasser.

 

    Bernard, dit Nanard mon colocataire de gauche, dernier né de la grande maisonnée, ne tarda pas à nous rejoindre. Jeannine son aînée, s’allia au clan des jupettes et le nouveau kami case quant à lui nous réduisit sérieusement l’espace! Le pire était à craindre et ne tarda pas à venir! Doté  d’une maladresse digne d’apparaître dans le livre des records, notre bad boy en moins de temps pour le dire, dépouilla notre quartier général  de  toutes ces richesses et  franges dorées.

 

    Le club  des mini  dentelles fit implacablement son rapport aux autorités supérieures, ce qui nous valûmes quelques avoinées ! La sanction fût hélas immédiate et sans appel et notre cadillac définitivement déclassée! 

 

    A la fin des vacances, Henry déménagea quittant à mon grand désespoir définitivement le Patronage. J'eus mon premier bleu au cœur! Peu de temps après notre corbillard  disparut à son tour sans que je  sache ni comment, ni pourquoi! L’épreuve du pot  fût réussi et s’acheva alors à jamais le temps des couches culottes !

Écrire commentaire

Commentaires: 0